En cheminant avec deux ânes de Catalogne en Bretagne....
Traverser
par les chemins, les petites routes et les sentiers un pays qui se perd
à force d'être lacéré, bitumé et asphalté, c'est le découvrir tel qu'il
est et tel qu'il a été: un pays de petits âniers. De Bretagne en Catalogne l'année dernière, et maintenant à mi parcours du chemin de retour (qui est passé par la montagne noire), le tout à pied bien entendu, nous allons de village en village, et les distances semblent convenir parfaitement aux pas de nos ânes.
Finalement, l'imprévu, l'incongru, l'obstacle, c'est la Nationale,
l'Autoroute, la Zone Commerciale ou pavillonnaire, lieux de multiples
dangers, et de rencontres impossibles. Entre tout
ça, aujourd'hui, il y a la Nature, la forêt, les vallons, les mûres et
les fraises sauvages, les champs, les prairies et les petits villages.
La Nature qui change avec les accents, du sud au nord, avec des
variations infinies, et qui s'adapte tant bien que mal aux dérèglements
impressionnant des températures, comme nous devons le faire quand nous
cessons de la braver en la détruisant. Nos petits ânes, Bambou et Gaspard, qui portent nos sacoches (30 kg chacun, c'est à dire 1/5ème de leur poids) accomplissent
l'exploit de relier tout simplement les gens et les villages, de faire
naitre des sourires incroyable et le passé des anciens.
Ils nous offrent un accueil que nous ne pourrions espérer sans eux et
qui fait oublier les sirènes de malheurs et les semences de zizanie.
Ils marchent partout, ils sont chez eux, mangeant au bord des routes,
curieux des paysages et des nouveaux prés à brouter la nuit.
Et notre enfant, Nour, qui dormait sur notre dos l'année dernière quand
nous marchions découvre à présent, à l'âge de 2 ans la magie du chemin,
les marguerites, les fleurs de pissenlit, les renards cachés dans la
forêt, les lapins et les chevaux qui apparaissent, les arbres et les
couleurs des fleurs. Quand on s'arrête, elle retrace le chemin et se souvient des gens.
Pourquoi nous déplacer ainsi ? C'est découvrir une vie, un chemin, des rencontres dans une continuité.
Se libérer de la facilité des déplacements en sauts de puce, en trajets
contraints par une logique routière, cette métamorphose des territoires
en zones urbaines privées de nature.
Bref reprendre pied dans ce qui reste de réalité, de vrai
chemin, celui que tant d'ânes pendant des millénaires ont
parcouru.
Prendre des chemins qui mènent quelque part, se laisser guider par nos
pieds et ceux des ânes pour voir ce qu'on ne voit pas autrement.
Voyager ainsi, c'est aussi ressentir combien nos ânes sont précieux,
essentiels et tacher de devenir pour eux des guides bienveillants afin
d'obtenir leur confiance. C'est vivre les 2
premières années d'un enfant à plein temps et à pleine vie et puis c'est
une façon de faire les choses sans trop de raison, sans plan, car nous
ne pouvons pas justifier tous les bonheurs que nous y trouvons, ni les
moments difficiles, c'est prendre la liberté de choisi ses chemins,
comme celle de nous perdre parfois, lentement...
Caroline, Olivier et la petite Nour ont
adopté deux ânes pour les accompagner dans un périple qui les a menés
jusqu'en Catalogne. Ils sont aujourd'hui de retour avec des projets
plein la tête.
Le témoignage
Grands adeptes de la marche, Caroline, 37
ans, et Olivier, 47 ans, ont un jour décidé de prendre à la route, pour
vivre au jour le jour. « Notre fille Nour avait un an et on la promenait souvent sur le port de Tréboul. Un jour on s'est dit : C'est trop bête, autant avancer ! »
Pour les accompagner dans ce périple, ils adoptent Bambou et Gaspard, un couple d'ânes « inséparable »
pouvant porter chacun une trentaine de kilos. Sur leurs dos, la famille
stocke un peu de nourriture, leurs vêtements, quelques jouets, une
tente et trois duvets.
Et surtout, « une guitare et un nez de clown »,
accessoires indispensables pour que la musicienne et le comédien
puissent se produire sur la route, au hasard de leurs arrêts et des
rencontres.
Un mode de vie « décroissant »
« On n'avait
pas d'idée précise en partant, on pensait aller vers les Alpes... C'est
le froid de la Vendée qui nous a poussés jusqu'en Espagne. »
En avril 2016, la petite famille s'élance, Nour confortablement
installée dans un porte-bébé sur le dos de son
papa.
Doucement
mais sûrement, au rythme du pas de Bambou et Gaspard, ils passent par
le Lot, le Tarn, puis La Montagne noire de l'Aude, toujours sur de
petits sentiers, en évitant les villes et les zones urbaines.
« On a vécu à l'écoute des ânes et de la petite, explique simplement Olivier. On
n'est pas dans l'exploit sportif. On a avancé à notre rythme. Sans
jamais rien planifier, on a toujours trouvé un endroit pour s'installer,
une pâture pour les ânes... »
Après six mois de
marche, c'est la Catalogne. Sur place, de Perpignan à Barcelone,
Caroline découvre une zone musicalement riche, avec la rumba catalane.
Olivier donne, lui, quelques spectacles de clown.
Suivant un mode de vie qu'il qualifie de « décroissant », le couple reste six mois sur place avant de reprendre la route au printemps.
Depuis un mois, après quelque 2 500 km aller-retour, la famille vient de retrouver la cité Penn sardin.
Des projets, Olivier et Caroline en ont encore plein la tête. D'abord, raconter leur expérience dans un livre, «
pour donner envie aux gens de faire la même chose que nous. Il ne
faut pas avoir peur, tout le monde peut le faire. »
Et hors de question pour eux de se séparer de Bambou et Gaspard. «
On voudrait qu'ils continuent d'avoir une utilité. Quand on arrive
quelque part avec des ânes, les gens sont toujours contents. On veut
garder cet esprit de voisinage. »
En les habituant à
l'attelage, le couple espère pouvoir les inclure dans des projets, comme
un spectacle itinérant en Centre-Bretagne.
Mais surtout, ils
espèrent pouvoir garder le plus longtemps possible cet esprit de liberté
et de simplicité qui les a guidés pendant plus d'un an et demi.
« On a réussi à vivre avec quasi rien pendant deux ans, résume Caroline. Notre
vie, les rapports avec les gens, tout était plus simple sur la route.
On était dans une énergie du don : on n'a besoin de rien et les choses
viennent à nous. »
Leur philosophie ? Prendre soin de chacun. «
Être à l'écoute de chacun de nous à commencer par Nour, mais aussi des
animaux. Pour cela, les pauses sont fréquentes et surtout, le chargement
des ânes effectué avec beaucoup de soin. Quant à Nour, dormir dans son
sac à dos, bercée par le pas de son papa, semble un de ses plaisirs préférés. »
dans L'indépendant du 6 février 2017:
http://www.lindependant.fr/2017/02/06/des-migrants-bretons-et-quadrupedes-de-surcroit-en-villegiature-c-au-can-decreix,2289844.php
Des migrants bretons et quadrupèdes de surcroît en villégiature à Can Decreix !
Mon Dieu que le chemin
est long et tortueux de la
Bretagne à Cerbère. Surtout
quand il faut faire un
détour par la Catalogne espagnole.
Voilà l’histoire de
Bambou et Gaspard, deux
petits ânes charmants, qui
n’ont pas hésité à suivre
Caro, Olivier et la petite
Nour, tout juste un an, au
départ de l’aventure pédestre,
sur les chemins de
France. Depuis le mois
d’octobre en villégiature
au sein d’un troupeau de
grands ânes, ils s'exerçaient
à l’apprentissage du
braiment catalan. Ce
week-end, accompagnés
de François Schneider,
deux et quatre pattes franchissaient
le col de Banyuls,
en passant par la
route des crêtes, pour venir
prendre leurs quartiers
de printemps sur les terres
cerbériennes. C’est
chez Corinne de Las Occas,
fervente et engagée
protectrice de la cause animale,
que Bambou et Gaspard
vont trouver refuge
et couvert pour quelques
jours de repos mérités
avant de s’aventurer dans
les vignes non traitées et
les terrains en friche, sagement
gardés par une clôture
portative. Les amis de
Can Decreix, ce mas au
dessus de la rue des Oliviers,
peuvent être assurés
que le spécialiste en botanique
cerbérienne et du recyclage
écologique, François
Schneider, avec sa
cuisine végétalienne saura
faire découvrir à son frère
Olivier et tout son petit
monde, la richesse et les
bienfaits de la flore méditerranéenne,
sous le soleil
catalan. Juste avant qu’ils
ne retournent respirer l’air
marin et humide de leur
belle Bretagne, au risque
de regretter quelque peu
les saveurs et douceurs du
climat méditerranéen de
Cerbère.
Gilles Meunier
dans La Nouvelle République, le 28 août 2017:
Amour et joie de la marche des rencontres et des
ânes
Publié le 27/08/2017 à 05:36 | Mis à jour le 27/08/2017 à
05:41
Route de La Foye-Monjault ou place de Marché pour y chanter avec
la guitare, Nour, Olivier et Caroline s'adaptent au climat, aux
rencontres et à la vie.
Caroline et Olivier, avec Nour, sillonnent la France et même
au-delà avec leurs ânes, Gaspard et Bambou. Ils ont fait halte il y
a peu à Treillebois.
Caroline Bourdais, un tout petit peu contrariée au bord du chemin
de Limouillas, observe nerveusement Gaspard et Bambou attachés court
au poteau de ciment. La journée a pourtant bien commencé. Philippe
et Jacqueline Rogeon ont eu leur moment de vacances à domicile, en
faisant une vraie rencontre avec des baladins marcheurs. Chez eux,
Caroline et Olivier ont eu leur café avec l'habitant et une amitié
en gourmandise.
Nour, 2 ans et demi, a eu aussi les attentions de ses parents. Ils
sont allés chercher les nécessités au supermarché. Musique
commerciale, monde décalé, le passage à la caisse ne s'est pas
fait de gaîté de cœur. Ce qui fatigue la maman, c'est la traversée
des bourgs. Et ce n'est pas tout. Le passage de la grand route est
devenu dangereux avec une voiture conquérante peu attentive au
pittoresque. À 37 ans, le plus cher désir de Caroline est de goûter
au plaisir de la nature, de faire équipe avec l'animal, d'apprendre
aux ânes et d'offrir à sa fille une façon de vivre le voyage à
100 %. Finalement elle le réussit presque tout le temps.
Elle
est allée un mois avec un âne au Maroc, dans la Drôme et elle a
accompagné une amie en roulotte en Roumanie. Elle était donc fine
prête pour aller du Finistère à la Catalogne par chemins et
sentiers. Ce voyage, c'était en 2016 avec la canicule, les feux de
forêts et les ânes du Maine-et-Loire pas encore habitués à
marcher. Sabots nus.
Le 17 avril 2017, les randonneurs étaient à
Cerbère, tout au sud méditerranéen de l'Occitanie. Olivier
Schneider a un frère vigneron dans le coin. Il a remonté la France
avec la petite famille, enfant dans le porte-bébé, jusqu'à la
Charente. Occasion de tisser toutes les connaissances sur le passage.
Là, à Bioussac avec le Théâtre du cheval bavard où il avait déjà
fait beaucoup de spectacles. Poète, directeur de la compagnie
théâtrale Theôrema en Seine-et-Marne, dramaturge, auteur, acteur,
clown, journaliste, le voilà qui rejoint Douarnenez où ils vivent
actuellement. En passant par Treillebois, où ils sont accueillis
sous la pluie d'orage chez Pierre Janvier et Marianne Mercier.