theôrêma présente
Projet de mise en scène de "La Filature" de Sophie Calle
avec Isabelle Auvray
L'Equipe de Création:
mise en scène: Olivier Schneider, scénographie: Antoine Flament & Fanny Chenu
lumières: Raphaël Lerigoleur
Un projet scénographique suivi par Gilles Taschet, scénographe au Théâtre Les Amandiers de Nanterre
Intention de Mise en Scène:
Ce projet est né d'un premier travail en atelier avec la comédienne, Isabelle Auvray, en retenant le principe que le texte de Sophie Calle est l'histoire sensible d'une suite d'actions complexes qui ne sont pas décrites. Ce qui est écrit, et ce qui est dit par la comédienne, est ce qui émerge d'une aventure personnelle vécue par l'auteur / comédienne. En progressant dans le travail, il m'est apparu que la comédienne ne pouvait échapper de se confondre avec l'auteur – elle-même comédienne de son propre rôle. L'acte de se transformer pour l'attention de l'autre (le détective ou le spectateur), est ce qui fonde à la fois l'expérience annotée de Sophie Calle, et celle de la comédienne au théâtre. C'est pourquoi j'ai demandé à Isabelle de venir se maquiller et de mettre une perruque à vue sur le plateau, après avoir traversé la scène sans aucun fard, pendant la citation (off) de Paul Auster. Transformée sans mystification en une représentation de l'auteur de l'expérience, la comédienne suit un parcours invisible et sensible qui fait entendre le texte concis et extrèmement précis de Sophie Calle. Une approche à la fois rigoureuse et détaillée à partir du texte de Sophie Calle, et ouvertes aux ressources propres de l'interprète, à son imaginaire, à sa présence (chaque silence, chaque geste racontant une histoire, une émotion). Ce parcours sensible, définit entre metteur en scène et actrice se complète d'une approche scénographique. Les cadres qui sont ceux de la photographie, comme un raccourci de ceux de la scène, rappellent le contexte dans lequel se situe l'expérience de Sophie Calle. Les photos sont des moments volés à l'éphémère, autant souvenirs que contraintes visuelles, et je souhaîte explorer ce que cela dénonce ou souligne des enjeux de la scène en collaboration étroite avec les scénographes Antoine Flament et Fanny Chenu. Autant d'axes de recherche stimulants et sensibles, avec une certitude: l'expérience de la Filature de Sophie Calle, si elle est une expérience de vie, elle en est une aussi de théâtre et de représentation, en reposant la question du public, de l'observant et du témoin. Pour qui l'on se montre, pour qui l'on se transforme, pour qui l'on revit un parcours personnel, ou bien fictif? Olivier Schneider
Sophie Calle :
Née en 1953 à Paris, Sophie Calle part au début des années 70 pour un long périple à travers le monde. C'est lors d'un séjour en Californie en 1978, qu'elle prend ses premiéres photographies «sans vocation» : des tombes portant l'inscription «Father» et «Mother». A son retour à Paris, elle commenœ ses premiéres filatures d'inconnus dans la rue, dérive contrôlée dans la ville, qu'elle agrémente de photographies et de textes, consignés dans des carnets. En 1980, à Venise, elle suit à son insu un inconnu rencontré à Paris (Suite vénitienne), ou se fait elle-même filer par un détective professionnel (la Filature, 1981). Elle invite 28 personnes à dormir dans son propre lit et les photographie pendant leur sommeil (les Dormeurs, 1978). Déguisée en femme de chambre, elle consigne et photographie les effets personnels de clients anonymes dans leur chambre d'hôtel (Hôtels, 1983). Pendant l'été 1983, ayant trouvé un carnet d'adresses, elle publie dans le joumal Libération, sous forme de feuilleton, les informations recueillies sur son propriétaire auprès des personnes dont le nom figurait dans l'agenda (le Carnet de Pierre D)... Le travail de Sophie Calle a pu ainsi être apparenté à celui des artistes des années 60-70, où le statut de l'image photographique concemait la trace, la preuve objective de leurs expérienœs et de leurs performances. Son oeuvre se rapproche davantage en fait d'un art narratif, d'une histoire. «Histoire» : le mot est lâché. L'art de raconter des histoires. Au fil des années, de récits fictifs en situations construites, l'artiste est devenue un personnage public. Sa vie privée, exposée en permanence, n'en est plus une. Sa biographie s'écrit dans les articles de presse qui lui sont consacrés et dans œs petits ouvrages publiés chez Actes Sud qui, depuis l'exposition Double Jeu en 1998, reprennent ses premiers travaux. Double, voire triple jeu, incessant dans le travail de Calle, à tel point que les identités se confondent jusque dans l'artifice de la fiction romanesque: Paul Auster, dans son Léviathan, ne fait-il pas jouer à l'un de ses personnages certaines des actions de Calle, qui elle-même tentera de devenir personnage de roman (De l'Obéissance, 1999) comme elle est devenue personnage de film (No SexLastNight, 1995)? Sophie Calle explore le rapport ambigu entre l'art comme espace de représentation illusoire, comme fiction du réel, et la vie, sphère de l'intime et de l'histoire subjective. Dans une époque marquée par le glissement vertigineux du rapport entre le public et le privé, cette trahison de l'intime est d'autant plus forte qu'elle se situe sur le terrain d'une pratique artistique: les intrusions de Calle dans le territoire privé auraient été d'un intérêt (de scandale) moindre s'il s'était agi de pures fictions. Or ici, la «véracité de l'image» est attestée, augmentée encore par la présence de textes intervenant à la manière de légendes, de preuves accumulées, ne faisant que démultiplier son pouvoir fétichiste: dans ces photographies plates et crues comme des images pornographiques, aucune velléité formelle ne vient contrarier la frénésie de voir. L'exhibition publique de l'intime, de ce qui habituellement ne circule que dans un cercle social restreint, tel l'album de famille (le Rituel d'anniversaire, 1980-1993), joue sur les mêmes fantasmes voyeuristes du spectateur. Voyeurisme et «objectification du sujet», qui ne peut se réaliser, dans ces simulacres de récit personnel où l'identité mise en abîme est autant œlle de «Sophie Calle» que d'anonymes, sans une identification.
Isabelle Auvray, formée à l'Ecole du Théâtre
National de Chaillot, à joué dans Annibal (création du théâtre de Nogent),
dans le Crabe , Les Cuisinières de Carlo Goldoni (m.e.s. Justine Heynemann, lecture
du théâtre 13), Les Fourberies de Scapin (C° Néo-vent), NOCTURNE POUR UN CADAVRE
écrit et réalisé par Julien DOUMENJOU - moyen métrage, avec le Cubitus (m.e.s.
Jean-Yves Brignon) : Kaab enfant du Sahara, Hamlet de Shakespeare, Comptes de
Fées
Olivier Schneider, issu du Mastère de mise en scène, dramaturgie de Paris X Nanterre: ateliers pratiques de Frédérique Fisbach (Studio théâtre de Vitry), de Gilles Taschet (Nanterre les Amandiers) de Lucien Attoun (Théâtre Ouvert), de Jean Boillot, de Jean-Yves Ruf, de Dominique Boissel (la Cartoucherie théâtre de la Tempête), de Jean Jourdheuil et de David Lescot. Mises en scène précédentes: Métro (version acoustique) de Marie de Beaumont (Rencontres de la Cartoucherie - théâtre de la Tempête), l'Annulation, Choses Tendres pour Théâtre Ouvert, Battista (morceaux de verres coupants), Molière (l'Avare), Zinaïda Gypious (Non et Oui), Daniil Harms (Radix) , Karl Valentin (sketches). Assistant et stagiaire de Jean Boillot (Laborintus II), Patrick Ehrhard (Chorégraphies), Thierry de Peretti (Gengis parmis les Pygmés / Vieux Colombier), Jacques Lassale (Platonov / Comédie Française)
Antoine Flament, architecte DPLG - ENSA Paris Malaquais.
Fanny Chenu, Ecole d'Architecture de Paris-Belleville,...
Dernière Filature, (avec la Galerie Perrotin)
L'étude pédagogique de l'oeuvre de Sophie Calle
A propos des récits autobiographiques de Sophie Calle